Lorsque l’on travaille dans une institution et notamment une institution publique, le client n’est pas forcément celui qui passe la commande et c’est en grande partie ce qui m’a posé problème toute ma vie.
Bien sûr on va impliquer les métiers; médecins, soignants, personnel administratifs, les ressources externes le cas échéant et peut être mêmes des représentants des patients dans certains projets. Cela ne change finalement pas grand-chose, à partir du moment où le projet sur lequel on travaille tous, est demandé par une instance ou la direction, pour sécuriser des données, pour partager de l’information, pour tracer des actions ou pour toutes autres raisons aussi bonnes (ou pas) soient-elles.
Certains projets sont réalisés pour optimiser le travail des uns et des autres, pour réaliser des économies ou en encore pour répondre à une demande précise, mais dans très peu de cas les demandes viennent des utilisateurs eux même. Le client et l’utilisateur ne sont pas les mêmes personnes et c’est là que les soucis commencent. Puisque l’utilisateur n’est pas le client, il n’est que très rarement demandeur et fatalement lorsqu’on réalise le projet on ne peut pas lui fournir ce qu’il a demandé. Chacun à son avis sur ce qu’il attend (en même temps globalement il n’attend rien, si ce n’est qu’on ne lui change pas ses habitudes) ce qui rend le projet complexe et qui au final donnera forcément des insatisfaits. De plus il est extrêmement difficile de s’impliquer dans un projet qu’on n’a pas souhaité et dans lequel on a été presque désigné volontaire. Néanmoins, j’ai pu travailler avec des personnes remarquables qui se sont engagés pour le bien de tous, mais au final, cela représente une petite partie du personnel et fatalement au moment où on démarre le projet, on se retrouve avec beaucoup d’insatisfaits.
J’ai rarement eu l’occasion de voir des utilisateurs heureux lorsqu’un nouveau projet démarrait, même si celui-ci pouvait apporter beaucoup à ceux qui allaient l’utiliser. Le projet informatique ou le site web peut être aussi beau et puissant que possible, il peut apporter de grosses amélioration dans les conditions de travail, à partir du moment on met en place une solution, cela se passe rarement simplement.
Tout nouveau projet ou remplacement de solution existante est considéré comme une nouvelle contrainte, même si au bout du compte, quelques mois plus tard chacun se rend compte de l’utilité et des améliorations du projet concerné (il arrive aussi, heureusement très exceptionnellement, que la nouveauté n’améliore rien ou pire encore qu’elle dégrade les conditions de travail de certains, typiquement lorsqu’on nous demande de mettre en place des outils pour effectuer des mesures, ou tracer l’activité). Combien de fois ai-je entendu, « je n’ai pas le temps de jouer avec votre truc, je ne suis pas là pour faire de l’informatique, je suis là pour soigner » ou « On passe plus de temps devant l’ordinateur qu’avec les patients.
C’est deux phrases sont d’ailleurs justes, car ils gagnent du temps avec les outils informatiques typiquement pour accéder aux informations du dossier médical, pour obtenir les résultats de laboratoire ou les images radios, mais l’état, la DGOS, L’ARS demandent tellement d’informations pour sécuriser les dossiers ou pour permettre aux établissements d’obtenir des crédits, qu’il est nécessaire de tout noter en permanence dans les dossiers des patients. De ce fait, ce qui aurait pu être apprécié devient une contrainte et au bout du compte considéré pas tous comme une perte de temps.